CÉCILE BABIOLE

L’œuvre

Copies non conformes

2013-2015
270 x 200 x 15 cm
170 lettres en matière plastique en (ABS)et 10 perches en bois
Impression 3D
Courtesy Production Les Ondes avec l’aide de ENSBA Paris – Pôle Numérique (2013), Goldsmiths University of London – Department of Computing (2014) et de l’Espace Jean-Roger Caussimon (2015) 

Alors qu’en 2010 elle observe le passage entre modèle numérique et objet physique, l’idée de cette œuvre murit et c’est alors que démarre son intérêt pour le texte et ses avatârs. Cécile Babiole signe ici une installation de petites sculptures qui subissent une érosion et une mutation à mesure de l’opération de reproduction. Chaque bloque est constitué de 17 caractères typographiques formant une phrase « JE NE DOIS PAS COPIER ». Mais à mesure que l’œuvre se constitue les caractères de la phrase sont de moins en moins lisibles. Dans cette œuvre, la phrase s’inspire des punitions de son enfance qui consistaient à recopier manuellement des phrases sentencieuses 100 fois. Ici la phrase est recopiée en utilisant un procédé de fabrication numérique. Chacun des signes est modélisé et imprimé en 3D, puis l’objet résultant est numérisé grâce à un scanner 3D. Ce nouveau modèle est réimprimé, et ainsi de suite. Le résultat de cette opération révèle que chaque nouvelle génération accentue la dérive de forme jusqu’à ce que les dernières sculptures reproduites soient devenues méconnaissables. Selon les opérations il y a perte ou gain d’informations et donc une distorsion de forme se crée. Selon l’interprétation de l’artiste, cette œuvre constitue l’expression d’un des paradoxes de notre culture numérique. Ce paradoxe tient au fait que la possibilité de reproduire à l’infini des informations s’accompagne d’une fragilité maximale des supports. Ainsi cette œuvre est une forme de vanité numérique, de ruine numérique. Le titre de l’œuvre est inspiré d’une nouvelle littéraire de Philip K Dick, Pay for the printer (1956), dans laquelle la survie des humains dépend de la capacité à reproduire à l’identique les objets du quotidien et la nourriture, mais avec le temps les copies sont de moins en moins opérationnelles jusqu’à devenir inutilisables. C’est cette même réflexion que poursuit Cécile Babiole à travers cette installation réalisée sans câblage ni électricité, une des rares de sa production.

L’artiste

Cécile Babiole est une artiste française qui vit et travaille à Paris. C’est à Metz au début des années 80 que Cécile Babiole fonde son groupe de musique rock-tribalo-industriel, NOX. Elle entre ainsi dans l’histoire de la musique industrielle mais ne s’y cantonne pas, elle inscrit ses recherches sonores dans une démarche et une réflexion plus large et étend son art au support vidéo et plastique. Elle passe de la musique à l’art électronique puis à l’art numérique en évoluant de manière transversale. Elle associe arts visuels et sonores à travers des installations et des performances qui interrogent avec singularité et ironie nos systèmes de représentations et nos technologies. Elle explore les conséquences du passage répété de l’analogie au numérique et vice versa et met ainsi en scène la dégradation de l’information. Cécile Babiole évolue dans un univers de machines et s’approprie une culture de masse pour en tirer une confrontation entre passé et présent, techniques obsolètes et contemporaines et créant, avant tout, un univers pour raconter des histoires. C’est donc le lien entre la machine et l’homme qui l’intéresse, ce dont témoignent ses derniers travaux qui présentent une confrontation entre le numérique et le physique. Ses œuvres ont été exposées au Centre Pompidou à Paris, à Mutek-Elektra de Montréal, à Beijing, à Lima et elle reçoit de nombreux prix qui récompensent ses installations et performances, notamment le prix Ars Electronica, Lacarno, le prix SCAM ainsi qu’une bourse à la Villa Médicis hors les murs. Elle est également membre du collectif d’artistes-commissaires Le sans titre qui appréhende la pratique curatoriale comme une pratique artistique à part entière.